Pistolero by Camille Bouchard

Pistolero by Camille Bouchard

Auteur:Camille Bouchard
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
ISBN: 93ea3aa58ce89a763a83a786cf772eda71cfcfa5
Éditeur: Editions du Boréal


10

—  « Rien qu’on puisse faire à distance. Stop. Débrouillez-vous. Stop. »

Delgado riait, mais sans joie, en regardant la petite bande de papier perforé. J’ai tourné les yeux vers mon père. Il avait le front barré de plusieurs plis soucieux. Il réfléchissait intensément. Le télégraphiste de Pancho Villa a menacé une fois de plus le vieux Sanchez avec son colt.

—  Je vais te tuer, Hipólito.

—  Et ça t’avancera à quoi ? a demandé le vieil homme qui, décidément, n’était pas facile à impressionner.

Mon père a proposé:

—  Émettons un message disant que les révolutionnaires arrivent.

Delgado l’a regardé, les sourcils froncés. Mon paternel a poursuivi:

—  Mettons des mots comme « urgent », « à l’aide », des trucs du genre. Un peu de panique. Comme si le chauffeur du train était au désespoir.

—  Tu as entendu le capitaine Lavoie ? a dit Delgado à Sanchez. Tu vas émettre… euh…

C’est mon père qui s’est mis à dicter rapidement:

—  « Gros nuage poussière. Stop. Révolutionnaires arrivent. Stop. Vont voler marchandise. Stop. Besoin instructions urgentes. Stop. »

—  Pas trop vite, pas trop vite, a protesté le vieil arthritique en pianotant sur le levier de l’émetteur. On dit… marchandise… stop… besoin instructions…

Delgado a poussé un soupir en regardant un point invisible par-dessus les têtes de tout le monde. Il a murmuré:

—  Bon Dieu ! Pourvu que ça ne foire pas, cette fois !

L’attente a repris avec ce que ça suppose de sueur encore plus abondante et d’haleines plus acides. Je réprimais ma nausée du mieux possible. Mes poumons exigeaient de l’air frais, mais mon esprit était impatient de découvrir si le plan de mon père allait fonctionner.

Le retour des cliquetis m’est apparu précisément comme cette bouffée d’oxygène que j’appelais de tous mes vœux.

—  Juárez, a simplement annoncé le vieux Sanchez.

Delgado s’est emparé de la bande de papier perforé d’un geste sec. Le mouvement a fait bouger la table branlante.

—  ¡Hijos de la chingada ! s’est-il exclamé.

—  Alors, quoi ? s’est impatienté mon père.

J’ai vu que les regards de tous les autres pistoleros étaient également tournés vers Delgado. Ce dernier a lu:

—  « Évitez train tomber mains rebelles. Stop. Revenez nord. Stop. Demandez nouveaux ordres chaque station. Stop. »

—  Les fédéraux autorisent le train à se rendre à Juárez, a confirmé papa.

La cabane a vibré des « ¡Viva Villa ! » et « ¡Muera el mal gobierno ! » habituels. Mon père m’a souri, soulagé.

Sanchez a mis une nouvelle noix dans sa bouche, toujours indifférent.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.